Suite aux dernières manifestations
des taxis, nous avons demandé à notre ami Alexandre Sejdinov (ancien taxi) de
nous livrer son analyse.
TAXI Mag :
Les manifs des taxis, ont été un réel succès, non ?
Alexandre Sejdinov : Oui Christian, les
manifestations ont été un succès ! Je tiens à rappeler qu’en 1960 la même
attaque avait été essayée contre les chauffeurs de taxi et suite à leur refus
le projet avait été abandonné. Rendez-vous est pris dans 50 ans pour ceux qui
seront encore de ce monde.
Pour commencer mon propos je veux répondre à une
question qui m’a été posée par de nombreux ex-collègues taxis :
« pourquoi le gouvernement a immédiatement accepté de ne pas tenir compte
du rapport Attali, n’est-ce pas une façon de reculer pour mieux sauter après
les élections municipales ? »
- Le gouvernement ne reviendra plus sur le
dossier du taxi en le déréglementant, en revanche il demandera aux
représentants syndicaux de lui faire des propositions pour le
« moderniser », ce à quoi les chauffeurs ne sont pas hostiles à
condition qu’ils soient consultés et que la modernisation reflète la réalité
économique. La deuxième raison pour laquelle le gouvernement a reculé
aussi vite est due au fait qu’il a constaté que, d’une part, les chauffeurs
artisans ou locataires étaient prêts à se battre pour sauver leur profession et
que d’autre part travailler 70 h par
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semaine ne faisait pas d’eux des rentiers.
Le rapport Attali a en plus exacerbé la patience des députés de l’UMP.
- La deuxième question qui m’est souvent posée
concerne la stabilité du prix de la licence. Après avoir atteint des sommets la
licence suite aux bruits de déréglementation a fortement baissé, ce qui a
fait le bonheur de ceux qui avaient un petit apport et qui ont acheté sans peur
du lendemain. Mais elle n’a pas fait le malheur de ceux qui l’ont vendue car
ils l’avaient achetée à un prix plus bas 5 ans auparavant sans parler de ceux
qui l’ont obtenue gratuitement.
- Aujourd’hui elle s’est stabilisée et la
tendance si l’on regarde les vingt dernières années indique que petit à petit
elle va remonter. Ce que je souhaite, c’est qu’elle n’augmente pas plus vite
que l’inflation car la licence n’est pas un placement spéculatif en bourse. La
licence est un outil de travail qui permet tout en ayant un salaire légèrement
supérieur au smic, de se constituer un capital pour sa retraite, car les
retraités du taxi d’aujourd’hui perçoivent en moyenne 700 € par mois de pension
vieillesse… On peut facilement dire que s’ils n’avaient pas l’argent de la
vente de leur licence ils seraient pour un certain nombre d’entre eux des SDF.
T.
M. : En conclusion ?
A. S. : La conclusion est facile : «c’est
l’union qui fait la force», et que même si les taxis sont indépendants et en
concurrence les uns avec les autres sur la voie publique, ils doivent être solidaires
lorsqu’il s’agit de leur bien commun ,
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car en définitive ils partagent le même «gâteau» que certains
pour ne pas les citer ont tenté de leur prendre.
Mais heureusement que nous
sommes en démocratie et que le contre-pouvoir existe, nous le devons à ceux qui
depuis 1789 se sont sacrifiés pour nous.
T. M. :
C’est très républicain ça ! Quels conseils pour l’avenir ?
A. S. : Je conseille à
tous les chauffeurs de taxi qui remplacent leur véhicule de s’orienter vers des
modèles qui sont écologiquement propres parce que c’est mieux pour
l’environnement, et de par ce fait, ils
ne donneront pas la possibilité à qui que ce soit de les critiquer.
- Je souhaite que ceux qui sont abonnés à Roissy
ou à Orly fassent un effort pour descendre sur Paris afin de servir les clients
lorsque la voie spéciale taxi et covoiturage sera mise en place.
T. M. :
Pour Roissy, ce n’est pas simple !
A. S. : Pas simple,
certes, mais urgent ! Je souhaite enfin que chaque chauffeur de taxi qui
défend son steak pense d’abord au bœuf qui est à l’origine de son steak, car si
demain il n’y a plus de bœuf il n’y aura pas de steak. Autrement dit, en se
comportant correctement avec les clients, en respectant la réglementation du
taxi dans l’esprit et dans les faits, on défend toute la profession et par
conséquent son propre avenir.
T. M. : Ce que
vous me dites a l’avantage d’être clair !
Merci
Alexandre.
Propos recueillis par Christian Thomas
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